mardi 10 septembre 2024

3 - Devant l'âtre

Le soir devant l’âtre qui crépite, je repense à ma journée sur le point de s’achever tout à fait. Les étincelles qui jaillissent du foyer bercent mes pensées et me font voyager mollement dans mon demi-sommeil.
 
Les évènements des douze dernières heures me reviennent en mémoire et résonnent en moi comme le son atténué d’une cloche lointaine.
 
Je me revois tôt le matin dans la gare où je croise cette dame du monde à la taille mince, d’allure mondaine et portant un grand chapeau. J’imagine qu’elle partait à Paris voir un amant ou bien conclure une affaire d’importance chez un notaire des grands boulevards.
 
Et moi, je continue mon chemin vers le presbytère de la sous-préfecture offrir un tonneau de liqueur au curé.
 
Puis je m’en retourne chez moi couper un peu de bois. Avant de me reposer aux alentours de midi en méditant sur mon cheval autour de mes propriétés.
 
Je reçois mon amie la châtelaine au déjeuner et partage avec elle du pain, du fromage, des olives et des poires, arrosés d’un pichet de vin sans prétention.
 
Après une sieste dans la grange, je m’en vais rejoindre le forgeron avec qui je fais une course à vélocipède sur des chemins d’herbes folles et de poussière, là-bas dans la campagne perdue de l’arrière-pays.
 
Au retour de cette équipée champêtre, je rencontre un vagabond tout droit sorti d’une légende : une barbe à faire peur, des guenilles de roi déchu, un regard de prophète avec des propos d’ivrogne. Une sorte d’astre bipède en quête de feu et de gîte. Je lui abandonne quelques pièces qui soulageront sa faim, au moins pour aujourd’hui.
 
Je m’arrête dans l’atelier du maréchal-ferrant afin de faire une partie de bras de fer avec le maître des lieux. Je perds contre ce musculeux adversaire mais gagne le droit de lorgner sur la domestique aux amples tétins qui nous sert une chopine fraîche.
 
Je m’en vais récolter aussitôt après trois pleins paniers d’osier de pommes de pin pour alimenter ma cheminée. Puis assiste aux vêpres.
 
Au crépuscule, déjà un peu las, je prends un thé au bord de la rivière en attendant de faire réchauffer ma soupe.
 
Une fois rentré sous mon toit, porte ouverte je cause avec les corbeaux, leur raconte ma jeunesse, leur jette des miettes de biscuits au seuil de ma demeure.
 
Enfin, je dîne en compagnie de la flamme qui me chauffe.
 
Et j’en arrive à ce moment exquis, tard dans la soirée, où tiraillé entre la réalité et l’impalpable, je m’endors près de la braise.
 
Et prends lentement mon envol pour un monde étranger qui sera peuplé d’autres images, de nouvelles découvertes, d’étranges histoires que l’on appelle les rêves.
 
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