Aujourd'hui la colossale Nestorine a décidé d'aller courir le mâle,
histoire de se dégourdir les poings (car quand elle est en rut, elle cogne !) et
de s'aérer les ovaires.
Elle a choisi de se faire secouer les boyaux par Alphonse le tueur de
porcs. Alphonse est un solide gaillard à la mine d'abruti, au visage bourru
barré par une longue cicatrice. C'est une authentique brute épaisse qui ne
désoûle jamais et gagne sa gnôle en égorgeant des verrats chez les éleveurs du
coin pour le compte de bouchers marrons. C'est aussi un braconnier analphabète,
une sorte de bête puante à deux pattes, une âme primaire, un coeur de pierre, du
cuir à la place de la peau. C'est un ours, un loup, un boeuf.
Le genre d'individu à ne surtout pas rencontrer sur les chemins de
campagne, à moins d'être armé. Mais l'inoffensif Alphonse n'est pour la
Nestorine qu'un simple amuse-gueule, une mauviette de "femmelette" écouillée,
une tapette de bon à rien d'impuissant de bonne femme, un fumier d'incapable de
pédé qu'est même pas un homme... Rien que ça ! Mais Nestorine n'est guère
difficile dans le choix de ses partenaires, à ses yeux il n'y a pas de
reproducteurs dignes de ce nom dans son monde brutal. Elle aurait préféré un couillu, un vrai de vrai au lieu de ce mollasson de chochotte d'Alphonse. On le
voit, les critères de séduction et de virilité selon Nestorine sont très
sélectifs. Elle place la barre très haut.
Avec Nestorine l'approche nuptiale est réduite à sa plus simple expression
:
- L'Alphonse, y'a de la tripe de fumelle à te farcir ! Viens donc me tasser
la viscaille avec ton braquacouille !
A cette délicate invite Alphonse n'est pas en reste :
- Nestorine, tu veux de la braquaille à fumelle ? Tiens, prends donc ma
grosse pinasse dans ta viandasse à coche !
Ces mots à peine échangés entre les deux amants, la rude Nestorine se fait
saillir sur-le-champ par la bête. Non sans avoir cogné son partenaire quelque
peu imbibé de mauvais alcool afin de lui remettre les idées en place. Une fois
l'odieuse union accomplie, les deux amoureux se séparent sans mot dire.
Généralement Alphonse est sonné, copieusement maté par l'enflammée femelle à la
chair insatiable.
Répétons-le, Nestorine est une terreur de jeune fille d'à peine vingt ans,
un mastodonte tout en muscles, un puits intarissable d'énergie, une montagne de
testostérone, des pognes de bûcheron, une poitrine de centurion. Cent-vingt
kilos de violence, de granit et de tendresse à l'état brut. Un champion de lutte
en jupon. Elle cogne dur la Nestorine, surtout lorsqu'elle est en rut.
Nestorine, estimant que sa matrice a été bien besognée, s'en retourne à
présent à sa ferme : "y'a un boeuf à abattre pis à étriper pour la fête de la
saint-Hyppolite". Car il faut savoir qu'à la saint-Hyppolite c'est fête aux étables. Ne vous avisez surtout pas de demander à Nestorine ce qu'on fête dans la basse-cour ce jour-là, vous risqueriez d'y laisser des plumes.
Un conseil : évitez à tout prix de croiser la route de Nestorine. Que
dites-vous ? Que ce n'est après tout qu'une demoiselle si proche encore de l'adolescence ? Ne
vous fiez pas aux apparences !
Vous qui jouez les héros depuis votre salon citadin, on voit bien que vous
ne l'avez jamais vue à l'oeuvre, la "belle" Nestorine...
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