mercredi 11 septembre 2024

98 - L'abbé Perrin

Il était une fois un curé de campagne bossu et pervers qui engrossait régulièrement ses ouailles. L'abbé Perrin était une "nature", comme on dit. Son caractère était bien trempé, bien que son corps fût contrefait. Il aimait la bonne chère. Et surtout les femmes, à peu près toutes les femelles. Mais aussi le pinard, du plus aigre au plus choisi. Et encore les jeux de hasard, du plus minable au plus dispendieux. Et même disait la rumeur, les bordels les plus mal famés... Bref, le père Perrin était un vrai débauché, un digne disciple de Casanova.

Souvent il revenait de ses excursions douteuses tard le soir, parfaitement ivre. Sa jeune bonniche en payait généralement les frais, elle qui était belle et vertueuse comme une Vierge Sainte. Il la troussait sur-le-champ pour la saillir sur le pas de la porte du presbytère sans autre forme de procès. Il était fréquent que des passants vissent les ébats éhontés du prêtre qui ne se cachait d'ailleurs nullement. Il semblait même être particulièrement fier de ses publiques et acrobatiques prouesses... Le dévot était un authentique paillard, on devait au moins lui reconnaître cette qualité.

L'impie au dos courbé rendait toujours visite à ses plus flatteuses protégées après la célébration du dimanche. Sans doute les vertus toniques du vin de messe que l'officiant absorbait avec une piété toute chrétienne... C'est que l'éclésiastique pratiquait avec un rare scrupule la charité sur sa propre personne. Il avait au moins le sens de lui-même, à défaut d'avoir le soin de l'autre. Les plus laides de ses ouailles quant à elles se faisaient culbuter directement à confesse. Le religieux était esthète : il se réservait les plus jolis morceaux pour les grandes occasions. Pâques, Noël, noces, enterrements...

Aux funérailles il consolait les adorables éplorées. Aux mariages il exerçait son droit de cuissage sur les épousées, les déflorant au passage s'il avait omis de le faire au temps de leur communion, soit pour raison de décence à cause de leur puérilité, soit pour raison de goût, préférant les charnelles aux fluettes. Le ministre du culte avait une solide morale. Aux jours des fêtes, il besognait volontiers les Marquises, les Comtesses et quelques châtelaines. C'est qu'il avait du goût, le confesseur de ces dames !

A sa mort on sonna le glas dans toute la contrée : il avait tant essaimé, tant forcé de passages secrets que nulle pécheresse ne pouvait ne pas revendiquer avoir reçu au moins une fois l'hommage de son fécond bâton de pèlerin, pour certaines dans le temple interdit, pour d'autres dans le vase naturel selon qu'elles furent délicieuses ou repoussantes.

On peut dire qu'il avait vraiment la bosse dure, le calotin.

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